27/03/2017 – 16h30 Le Vigan (Lengadoc Info) – Le procès de l’abattoir du Vigan s’est tenu devant le Tribunal Correctionnel d’Alès les 23 et 24 mars. On se souvient du scandale provoqué par le montage vidéo du groupe L 214. Ont comparu les employés Soulié et Estève , le président de la Communauté des Communes Canayer, le salarié Granier, lui, ne s’est pas présenté.
Ce furent deux journées pénibles où ont été jetés en pâture les plus petits dans l’organigramme, ceux qui travaillaient le plus pour gagner le moins… taillables et corvéables à merci aurait-on dit dans un autre temps.
S’il est légitime de n’exonérer personne de sa liberté individuelle, il convient de mieux cerner les différents niveaux de responsabilité et le rôle des autorités publiques telles que la DDPP (Direction départementale de la Protection des Populations). On a beaucoup cité Monsieur Kauffmann directeur de l’abattoir, mais il n’a même pas été convoqué ni en tant que prévenu ni en tant que témoin, alors que son emploi semblait semi-fictif. Cité par le quotidien Midi-Libre le 29 août 2010, le directeur déclarait : « Nos agents ne font pas souffrir les animaux. C’est un aspect sur lequel nous sommes très vigilants ».
Manifestement, le manque d’encadrement et de gestion du personnel est manifeste : Marc Soulié, principal lampiste et prévenu, l’a fort bien décrit, lui qui se retrouvait souvent seul pour effectuer les opérations de la sortie de l’écurie -bêtes affamées, assoiffées, éblouies- jusqu’à la mise à mort et l’éviscérage !
Apprenti-boucher, puis stagiaire pendant 2 ans en STAE, le voici enchaînant les CDD à l’abattoir pour 1200 € mensuels. Quant à la formation, si elle existait bien, elle était, indique t-il, inadaptée car théorique. On ne devient pas « tueur » d’abattoir sans une formation sérieuse.
La Communauté des Communes du Pays Viganais représentée par Monsieur Canayer avait lourdement investi dans cet établissement déficitaire, consciente de sa nécessité pour maintenir les activité de l’élevage traditionnel en Cévennes. Le président a décrit l’intérêt de cette activité pour l’économie et l’environnement d’autant que l’Unesco a salué l’agropastoralisme traditionnel..
On peut regretter le manque de compétence des Bureaux d’études choisis ainsi que la quasi absence de conseils des services de l’Etat dans la réalisation d’un abattoir où la circulation des animaux était difficiles (angles, lumière, portillons inadaptés) et le matériel d’abattage obsolète et non renouvelé telles ces « fameuses » pinces à électro-narcose tant décriées par le prévenu. Marc Soulié dans son langage cru d’homme de terrain a fort bien décrit l’absence d’ergonomie de cet établissement.
On a évoqué également cette fiche qui était remise tous les mois au directeur, sur l’activité journalière, mentionnant les incidents survenus sur les bêtes traitées. Contacté par la rédaction de Lenguadoc-Info, le docteur vétérinaire Alain Deperetti a révélé qu’il existait aux Etats Unis une méthode dite « Temple Grandin », du nom de son inventrice, qui désignait 5 points de contrôle critiques pour évaluer la bonne marche des abattoirs (Établissement classé): 1° pourcentage d’animaux tués correctement, 2° pourcentage des animaux inconscients après étourdissement, 3° pourcentage des animaux qui vocalisent lors de leur passage dans les installations ou lors de l’étourdissement, 4° pourcentage des animaux qui tombent (signe de terreur), 5° Nombre de fois où l’on utilise l’aiguillon électrique. Par exemple, si l’étourdissement n’est pas correct à 100 % l’abattoir n’est pas homologué.
De plus, si l’on en croit le Midi-Libre (déjà cité) et certains détails en creux du montage-vidéo, l’abattage halal sans étourdissement aurait bien été pratiqué dans cet établissement, entraînant un relâchement du respect des normes et de la loi… Le préfet du Gard interrogé sur l’existence d’une demande de dérogation avait répondu par la négative. Cet aspect des choses a été évacué des débats, alors que cela aurait pu peser sur la perception de la souffrance animale sur les employés.
Le vrai débat a ainsi été occulté ; de nombreuses associations, attirées par l’odeur du sang et du scandale, se sont constituées parties civiles : Collectif anti-Corrida, SPA, Fondation Brigitte Bardot, Groupe L 214, Fondation Assistance aux animaux, One Voice, Association OABA, Association Protection des eaux, Mairie du Vigan, pendant qu’à l’extérieur, quelques militant affichaient des panneaux exigeant -sans rire- la fermeture des abattoirs.
Avec un mépris « de classe » assumé, le parquet estimait que le rire d’un employé (non poursuivi) au moment de l’abattage relevait du sadisme de son co-équipier… La présidente du Tribunal demandait au principal prévenu (apprenti boucher à l’âge de 15 ans) « ce qu’était un animal ? » et s’il pouvait donner une définition de l’état de conscience. Par contre le tribunal a survolé les conditions de travail et les réalités quotidiennes des employés de l’abattoir.
Il conviendrait enfin de s’interroger sur la valeur juridique de ces vidéos, aux images non datées qui pourraient concerner des actes prescrits ou qui pourraient avoir été manipulées ou relever d’un montage sélectif comme l’a souligné le défenseur de Marc Soulié.
Le procureur, sans sourciller, demandait à l’encontre du principal prévenu (jamais condamné auparavant ni ayant fait l’objet d’un quelconque avertissement par sa hiérarchie) une peine d’un an de prison avec sursis. Il a également requis contre lui une «interdiction d’exercer une activité professionnelle dans un abattoir pendant cinq ans», une interdiction «de détenir des animaux de rente», c’est-à-dire dévolus à la production, et 3.400 euros d’amende. Marc Soulié en plus de cela a été licencié par sa hiérarchie. Des peines de 150 et 600 euros d’amende ont également été réclamées contre les deux autres employés de l’abattoir.
Le jugement sera rendu le 28 avril à 9 h mais il semble bien qu’on n’ait pas fini de parler de cette affaire.
Photos : DR
Lengadoc-info.com, 2017, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine
Vous pouvez continuer votre article
ce lundi 27 mars L214 est revenu à l’abattoir à condamné les grilles avec chaines et cadenas plus de graves menaces on été faites sur Nicolas et Gilles directement ce week end. C’est la police qui est intervenue pour ouvrir les portes de l’abattoir ce matin afin de vérifier les lieux. Ces menaces avaient pour seul objectif de faire pression sur les salariés de l’abattoir afin qu’ils décident de quitter leur poste. Aujourd’hui Gilles a démissionné et Nicolas est en maladie jusqu’à la fin du mois d’avril et donc l’abattoir est fermé.