22/05/2018 – 08h00 Montpellier (Lengadoc Info) – Les médias vantent sans cesse la loi de 1905. Mais qui se souvient qu’elle mena la France au bord de la guerre civile ? Que fut cette loi et dans quel contexte intervint-elle ? Nous traiterons ce long sujet, tant sur le plan national que local, en plusieurs volets.
Après les expulsions, les brimades des gouvernements Jules Ferry
Si on parle des gouvernements Jules Ferry entre 1879 et 1885, c’est qu’il en fut le ministre le plus influent. Mais il ne fut président du conseil que du 23 juillet 1880 au 10 novembre 1881 et du 21 février 1883 au 30 mars 1885. Issu de la gauche républicaine, il toléra l’enseignement confessionnel mais chercha à éliminer les congrégations catholiques en les ruinant par deux impôts :
– La taxe sur les revenus des congrégations (l’impôt sur le revenu ne date que de 1914).
– L’impôt d’accroissement, transformé en taxe annuelle en 1895, frappait l’augmentation du patrimoine des congrégations, y compris les biens mis à disposition.
En cas d’échec, Jules Ferry annonça qu’il prendrait des mesures plus radicales. Mais ces menaces disparurent en 1885 avec la chute de son cabinet. Les catholiques se mobilisèrent et, grâce à la générosité des fidèles, en 1900, les congrégations étaient plus nombreuses, mais plus petites, qu’en 1880.
Photographies de deux fondations de l’abbé Emprin à Montpellier. Elles sont caractéristiques du dynamisme des congrégations catholiques et de l’adaptation de leurs œuvres sociales entre 1885 et 1900.
Ci-dessus, la chapelle Saint-Georges (à droite) et l’oratoire Don-Bosco (à gauche). Cette œuvre avait été modestement fondée en 1892 dans une villa du lieu-dit de « La Pierre Rouge ». Elle avait pour but de donner un foyer et une instruction complémentaire aux orphelins placés en apprentissage en ville. Mais le véritable essor intervint avec la reprise par les Salésiens en 1893 et le déménagement au Clos-Saint-Antoine, dans un quartier industrieux près du pont Juvénal. L’oratoire Don-Bosco y bénéficia des vastes bâtiments que la famille Faulquier avait fait construire près de son usine de bougies dont on aperçoit les deux cheminées au second plan. L’ensemble fut rasé lors de la construction du quartier Antigone.
Ci-dessous, l’établissement de la Charité fut fondé par l’abbé Emprin en 1894 à proximité d’une cité ouvrière destinée aux familles pauvres. Mêlant vie conventuelle et patronage, cette œuvre atypique connut des débuts difficiles. Mais l’installation d’une imprimerie par l’abbé Emprin et Mère Angeline, en 1898, assura sa réussite et permit de donner un métier et une formation à de nombreux défavorisés. La plupart des publications du diocèse et des auteurs catholiques de la région furent réalisés, durant plus d’un siècle, sur les presses de l’Imprimerie de la Charité. Les bâtiments existent toujours et abritent le « Foyer horizon Arche de Jean Vanier », destiné aux adultes handicapés.
Un climat lourd de menaces
En 1890, un prêtre de La-Salvetat-sur-Agout fut arrêté pendant les élections. Monseigneur de Rovérié de Cabrières lui rendit visite et le nomma vicaire de la cathédrale, s’attirant la colère du préfet. Le prélat, tout en évitant les provocations, s’inquiétait publiquement de l’anticléricalisme des gouvernants. Puis en 1899, les ouvriers, lassés d’attendre les réformes promises, commencèrent à protester. On pouvait craindre que le gouvernement ne tente de financer ses promesses en commençant par dépouiller l’Église catholique afin de retarder une augmentation d’impôts. Même si cela entraînait la disparition de nombreuses œuvres sociales.
Lors d’un discours prononcé à Toulouse le 28 décembre 1900, le président du conseil Pierre Waldeck-Rousseau dénonça les deux jeunesses, l’une catholique, l’autre républicaine, qui divisaient le pays. Il condamna les moines ligueurs soumis à la papauté et nuisibles à la France. Il dénonça les moines d’affaire qui amassent d’immenses richesses et les congrégations catholiques dont la valeur des immeubles […] dépasse le milliard.
Le milliard des congrégations ?
La gauche prétendit que, si la république s’en emparait, ce milliard financerait les retraites des ouvriers pauvres. Le gouvernement estima que les 3 216 congrégations catholiques possédaient un patrimoine global de 1 071 millions de francs.
En réalité cette valeur, basée sur les estimations de l’impôt d’accroissement, était très largement exagérée. Entre les biens que l’administration garda pour son usage et ceux vendus à bas prix dans des conditions douteuses, le peuple ne vit quasiment rien de ce soi-disant milliard.
Théodore Mnémosyne
Pour compléter :
Série Histoire. Les lois anticléricales de 1905 – le contexte historique
Série Histoire. Les lois anticléricales de 1905 – l’expulsion des religieux « hors-la-loi »
Photos : DR
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