18/11/2020 – 16h30 Montpellier (Lengadoc Info) – Dimanche dernier des milliers de catholiques pratiquants se sont réunis devant les églises de France afin de protester pacifiquement contre l’annonce de la fermeture des églises par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. Les fidèles tenaient ainsi à dénoncer cette atteinte à leur liberté de culte sous couvert de protection sanitaire. Des manifestations pour le libre accès à la messe qui ont eu lieu à Montpellier, Toulouse mais aussi Nantes, Versailles…
Lengadoc Info est allé interroger un catholique montpelliérain à ce sujet.
Lengadoc Info : Bonjour Stéphane vous étiez parmi les 150 personnes présentes devant la cathédrale Saint-Pierre à Montpellier ce dimanche. Quel était le but de ce rassemblement ?
Stéphane : J’étais effectivement présent à ce rassemblement qui comptait beaucoup de familles, des jeunes, des enfants, des personnes âgées… Un échantillon assez représentatif de la communauté catholique de Montpellier. Il y avait 2 grandes tendances, les gens de la paroisse de la cathédrale Saint Pierre mais également ce qu’on appelle les « tradis ». Des gens qui ont l’habitude d’aller régulièrement à la messe, ce qui n’est pas le cas de tous les catholiques en France. Le but était de demander à pouvoir accéder à la messe physiquement dans la mesure où, pour un pratiquant, la messe et le point d’orgue de sa foi. C’est une exigence hebdomadaire. C’est le moment où l’on commémore le sacrifice du Christ. Il faut impérativement une présence physique car, outre le sermon du prêtre qui peut éventuellement se faire en distanciel, il y a ensuite la consécration où le prêtre fait venir le Christ dans l’Ostie qui devient la chair du Christ et dans le vin qui est son sang. Cela fait partie des mystères de la foi catholique mais c’est quelque chose d’essentiel et de physique. Le croyant effectue enfin la communion où il reçoit le corps et le sang du Christ et ça ne peut pas se faire si l’on n’est pas présent face à l’autel. Il y a aussi la question de la confession qui peut difficilement se faire par internet.
Lengadoc Info : Est-ce que vous comprenez les mesures qui sont prises par le ministre de l’Intérieur en cette période de crise sanitaire ?
Stéphane : Oui bien sûr. Il n’y a d’ailleurs pas de citoyens plus respectueux des lois que les croyants. Mais il faut rendre à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. Dès le premier confinement, le clergé avait pris des mesures dans l’organisation de la messe. Parfois il y avait jusqu’à un banc sur deux qui était interdit d’accès, un fléchage avait été effectué dans la nef, du gel hydroalcoolique était à disposition à l’entrée, les gens étaient masqués… toutes les mesures sanitaires avaient été prises. Les messes avaient été multipliées de façon à diluer la quantité de fidèles. C’est donc de la mauvaise foi de la part du gouvernement qui a affirmé que les églises sont des foyers de contamination potentiels.
Lengadoc Info : D’une manière plus générale, que pensez-vous de la situation des chrétiens en France et dans le monde ?
Stéphane : Les chrétiens sont de plus en plus minoritaires. La société est de plus en plus hédoniste et matérialiste alors que le message du Christ et d’ordre spirituel. Contrairement aux chrétiens, le monde musulman n’hésite pas à revendiquer avec force sa foi. Cette période de doute qui s’impose aux chrétiens depuis mai 68 et son désir d’émancipation et de refus de toute contrainte a obligé une partie des chrétiens à se poser des questions. Au lieu de faire les choses de manière routinière, certains d’entre nous ont fait le choix d’approfondir leur foi. On retrouve ça dans le dynamisme de certaines congrégations, notamment chez ceux qu’on appelle les « tradis », où il y a beaucoup de jeunes. On constate que dans les séminaires traditionalistes il y a beaucoup de vocations. Les « tradis » représentent 1/5 des vocations alors qu’ils ne représentent que 2 à 3% des catholiques. Pour une centaine d’évêques, ils sont plus de 20 alors qu’ils devraient n’être que deux ou trois. Il n’y a qu’à assister aux offices des traditionalistes pour constater le nombre de jeunes et de familles avec enfants. On constate d’ailleurs cet engouement lors du pèlerinage de Chartres.
Lengadoc Info : Aujourd’hui, dans un contexte où la question religieuse, notamment avec l’islam, revient sur le devant de la scène, et que la question même de laïcité se pose, est-il facile de vivre sa foi chrétienne en France ?
Stéphane : Non, ce n’est pas facile. En tant que croyant je comprends que les musulmans soient choqués de voir les caricatures de Charlie. Avant Mahomet, « Charlie » avait produit énormément de caricatures très outrancières sur les catholiques et notamment Jean-Paul II. Il y a également la pornographie généralisée et toutes les choses qui font que le catholique peut se sentir tenté d’une part mais également ridiculisé pour sa foi. La foi est perçue comme une maladie honteuse et non comme une plus-value spirituelle. Le chrétien doit donc se faire discret, contrairement au musulman qui, lui, affiche avec force ses croyances. Et personne n’ose véritablement les contredire. La loi contre le port du voile intégral dans la rue n’est absolument pas appliquée. On est en voie de talibanisation, ce n’est pas un message religieux mais une revendication politique. Pour les catholiques cette période est un contexte difficile mais peut amener à réfléchir au pourquoi et au comment vivre sa foi. Elle en devient plus authentique.
Le gouvernement En Marche aurait intérêt à se méfier car les catholiques sont des gens discrets et respectueux des lois, mais quand on touche à ce qui est fondamental dans leur foi, ils resteront déterminés. C’est un mouvement qui échappe d’ailleurs aux évêques qui, eux, ne sont pas tellement d’accord pour qu’il y ait des manifestations. Le gouvernement devrait se méfier de cette vague de fond qui pourrait prendre de l’ampleur.
Photos : Lengadoc Info
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