24/09/2016 – 18h00 Syrie (Lengadoc Info) – Point de situation numéro 13 – Alors que la trêve mise en place le 9 septembre par la Russie et les Etats Unis vient de s’achever au bout de 10 jours, le Commandement Général de l’Armée Syrienne annonce aujourd’hui le début des opérations contre les factions jihadistes des quartiers Est d’Alep.
Incidents en série
Nous pouvons relever 3 incidents majeurs qui dénotent les difficultés rencontrées dans le cadre de conflits aux multiples belligérants et aux diplomaties à géométrie variable.
Lors de l’offensive jihadiste avortée dans le sud ouest de la Syrie qui aura occasionné beaucoup de pertes dans ses rangs, quelques roquettes ont malencontreusement (ou intentionnellement) atterri en territoire israélien sur le plateau du Golan tout proche. Ce fut le prétexte pour l’armée de l’air israélienne de bombarder des garnisons de l’Armée Arabe Syrienne située dans la région. Selon Tsahal, toute roquette frappant le territoire israélien entrainerait une riposte automatique contre les forces loyalistes de la région. Certaines partisans des théories complotistes y verront un appui direct de l’état hébreu aux factions jihadistes puisque tout le monde utilise son artillerie dans la région et qu’il est impossible de déterminer l’origine des tirs.
L’enclave loyaliste de Deir Ez-Zor a subi de nombreux assauts ces derniers temps avec des avancées importantes des troupes de Daech qui ont pu s’emparer du mont Al-Tharda qui domine l’aéroport militaire, offrant ainsi une position dominante sur les troupes loyalistes. Cette victoire aura été rendu possible par la « bavure » de la Coalition Internationale qui a « accidentellement » bombardé les troupes de Bachar El-Assad le 17 septembre 2016, occasionnant 83 morts et plus de 100 blessés. Le président de la Syrie définissait cette attaque d’ « agression flagrante et intentionnelle » suivi en cela par le ministère russe des affaires étrangères.
Deux jours après, un incident a mis à mal les efforts diplomatiques des grandes puissances. Le lundi 19 septembre 2016 un convoi humanitaire des Nations Unis et du Croissant Rouge, constitué de 31 camions à destination d’Alep Est, a été bombardé dans la ville d’Orem Al-Kubra. Indignation internationale accusant dans un premier temps la Russie et le camp de Bachar El-Assad, puis se rétractant au vu du manque de preuves. Encore un incident aux circonstances troublantes dont on ne sait à quel camp il profite.
Des membres des Forces Spéciales américaines appelés par la Turquie afin de soutenir l’avancée en direction d’Al-Bab ont été chassés le 16 septembre par les combattants de l’Armée Syrienne Libre (ASL) situés à proximité de la ville d’Al-Raï. Ces derniers reprochant aux américains d’être des « infidèles », des « porcs », des « chiens », des « croisés », des « envahisseurs »… et de soutenir les terroristes kurdes du PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan). Cet incident est révélateur des sentiments des combattants présentés par la Turquie comme des « rebelles » au gouvernement de Bachar El-Assad ou combattant l’Etat Islamique.
Le reste du Front
Les combattants islamistes ont profité de la trêve pour tenter de reconquérir les territoires perdus il y a peu au sud d’Alep et ainsi briser à nouveau l’encerclement de la ville. La tentative victorieuse avait pu aboutir grâce à l’emploi de nombreux kamikazes à bord de VBIED suivis par des vagues de combattants. Cette véritable submersion avait contraint les troupes loyalistes d’abandonner le « campus militaire » et le quartier de Ramousseh. Cet assaut victorieux avait entrainé des centaines de morts coté jihadiste. Il semblerait que les jihadistes soient à court de ressources humaines dans ce secteur puisque l’assaut sur le sud d’Alep de cette semaine n’a pas atteint son objectif. Les combattants loyalistes ont conservé l’initiative et ont bien l’intention de bousculer les salafistes. Soulignons l’effort exercé sur l’école Hikma ainsi que sur le quartier Souq Al-Jebès.
Au nord d’Hama, les combats sont toujours à l’œuvre depuis l’offensive menée par les factions jihadistes. L’Armée Arabe Syrienne et ses soutiens peinent à avancer même si l’avancée islamiste semble être endiguée.
Un autre secteur à surveiller est celui situé dans les montagnes au nord de Lattakié qui a connu des avancées importantes de la part des combattants loyalistes. La fin de la trêve devrait voir ce secteur se réchauffer. La proximité de la frontière turque et sa situation de surplomb de la plaine d’Idlib au nord ouest en fait une prise de choix.
Dans la région de Palmyre, de durs combats ont lieu entre l’Armée Arabe Syrienne et les combattants de Daech autour de champs gaziers. Une centaine de soldats islamistes auraient péri sous des bombardements dans la région alors qu’ils préparaient un assaut.
Sur le front nord, les troupes soutenues par la Turquie commencent à peiner dans leur avancée alors que l’opération Euphrates Shield semblait placée sous les meilleurs auspices. L’Etat Islamique regagne même des positions, perdues il y a peu, et se rapproche de la frontière turque. La ville d’Al-Raï est le pivot central des troupes turques qui commencent à envoyer des Forces Spéciales dans la région. Notons que de très importants matériels lourds sont déjà présents sur place et que d’importants stocks de matériel sont massés à proximité immédiate de la frontière. Rappelons que l’intervention turque peut devenir un casus belli entre la Syrie et la Turquie, avec les conséquences que l’on peut craindre du fait des alliances respectives de ces deux pays. Le président turc M. Erdogan refuse toujours de prendre contact avec le gouvernement de Bachar El-Assad bien qu’il occupe de fait une partie de son territoire, au prétexte d’une action militaire contre l’Etat Islamique.
Martial Roudier
Photos : DR
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